Savoir réagir à des accidents du quotidien, c’est le survivalisme.
Nous allons voir pour démarrer deux situations banales, qui peuvent arriver à n’importe qui, la première étant moins grave que la deuxième.
Première situation :
Vous êtes fumeurs (ce n’est pas souhaitable, voir l’article suivant sur la 3ème cause de mortalité au monde), vous demandez à un ami de vous allumer votre cigarette en bouche. Il rapproche le briquet de votre visage et en raison d’un mouvement malencontreux la flamme vous arrive sur un œil : Aie.
Vous vous éloignez aussitôt en vous pressant une paume de main sur l’œil atteint et en grognant.
Savez-vous comment mieux réagir à ce moment ? Savez-vous si c’est grave ? On vous explique tout ci-dessous dans la partie brûlure thermique.
Deuxième situation, infiniment plus grave :
Vous êtes occupé dans la maison à faire X ou Y activité, et tout d’un coup tout s’arrête car votre enfant de 2 ans hurle brutalement.
Vous vous précipitez et vous le trouvez par terre près de la machine à laver avec des éclaboussures de lessive liquide partout et notamment sur le visage. La catastrophe.
VOUS DEVEZ REAGIR EFFICACEMENT EN QUELQUES SECONDES, LA VUE DE VOTRE ENFANT EST EN JEU ! Comment ? On vous explique tout.
I. Dans quelles situations surviennent les brûlures oculaires ?
Les principales circonstances de survenue sont : les accidents de travail (70 %), domestiques ou de loisirs (25 %) et les agressions avec comme objectif de défigurer et d’aveugler (5 %).
Avec plus de 25 000 produits chimiques susceptibles d’être à l’origine de brûlures, les lésions oculaires chimiques sont de loin les plus fréquentes (85 %). Leur gravité dépend de l’agent chimique en question. Elles sont parfois redoutables car malgré un traitement bien conduit elles peuvent aboutir à la perte de la vue, voire du globe oculaire.
Les brûlures thermiques quant à elles, s’accompagnent de lésions le plus souvent superficielles.
ATTENTION ! Chez les enfants âgés de moins de 5 ans ce sont les capsules de lessive liquide ou en poudre pour lave-vaisselle et machine à laver qui sont les plus fréquemment impliquées dans les brûlures oculaires car confondues avec des bonbons ou des jouets.
II. Deux grands types de brûlures : thermiques et chimiques (acides et bases).
Les brûlures thermiques
L’atteinte oculaire observée au cours des brûlures par le feu est rare, entre 1 et 5 %. Il s’agit le plus souvent de brûlures par flammes ou liquides chauds qui se produisent dans le cadre d’un accident domestique (la fameuse eau bouillante ou le café très chaud).
Grâce à la vitesse du clignement, le globe oculaire est protégé et les brûlures se limitent aux cils, sourcils et paupières. Cependant, on peut quand même observer au niveau de la fente entre les deux paupières, une lésion à type d’ulcération de la cornée et de la conjonctive.
Dans les brûlures par contact, avec des solides qui retiennent la chaleur (cendres de cigarettes, poudre à canon…) et qui tombent directement sur les yeux, les lésions sont profondes conduisant parfois à la perte du globe oculaire.
Les lésions oculaires les plus graves sont constatées chez des patients qui présentent en plus des yeux, des brûlures cutanées étendues du 3e degré associée au niveau de la face (bientôt disponible article : « Réagir à une brûlure »).
Une mention particulière doit être faite sur les feux d’artifices qui conduisent souvent à des brûlures oculaires gravissimes.
Les brûlures chimiques par des agents acides et basiques.
Il faut comprendre que les brûlures oculaires par des produits de type base (l’eau de Javel par exemple) sont plus grave que par des produits dits acides.
Cependant, les lésions occasionnées par les acides forts sont superposables à celles constatées avec les bases
car en dessous d’un pH de 2.5 les lésions sont profondes et destructrices. Parmi les acides, l’acide sulfurique ou vitriol (H2SO4) est responsable des accidents les plus graves (agressions dites « de jalousie » par le vitriol sont malheureusement fréquentes dans certains pays d’Asie).
Les bases, en plus d’être les plus graves, sont également les plus fréquemment impliqué (2/3 des cas), parmi lesquelles : l’ammoniaque (NH3), l’eau de Javel (hypochlorite de sodium), la soude (NaOH), la chaux… La destruction totale du globe oculaire est possible.
Exemple d’une destruction complète la cornée (partie la plus superficielle de l’œil) par une brûlure chimique acide.
III. Quels sont les symptômes d’une brûlure oculaire ?
La symptomatologie peut être très expressive avec une baisse de la vue, une peur de la lumière ou photophobie (en réaction à la douleur provoquée par la lumière), un larmoiement et une douleur importante avec une possible sensation de corps étranger.
L’œil est le plus souvent rouge, pouvant présenter une véritable nappe de sang.
On peut également assister à un blépharospasme qui correspond à un spasme des paupières rendant l’ouverture spontanée de ces dernières impossible.
IV. Le traitement d’urgence d'une brûlure oculaire.
De sa précocité et qualité dépend le devenir de la brûlure car le lavage influence de façon décisive l’évolution et le pronostic de la brûlure oculaire.
RINCER ABONDAMMENT. Le lavage de l’oeil doit durer 15 à 30 minutes avec environ 1,5 litre de solution. L’utilisation de sérum physiologique est préférable à l’eau. Si possible il faut éverser les 2 paupières (= retourner les paupières. si vous ne savez pas le faire, ce n’est pas un souci, ne perdez pas de temps en essayant).
Le lavage de l’oeil doit également être effectué en cas de brûlures thermiques car il contribue à diminuer la température à la surface du globe oculaire.
Dès que vous avez commencez le rinçage, contacter les secours.
Le traitement médical instauré en suivant aura comme objectif de contrôler la réaction inflammatoire (corticoïdes locaux) et de favoriser la cicatrisation (larmes artificielles, vitamines C…).
V. Quelques situations particulières.
Les brûlures oculaires liées au froid.
Les brûlures de l’oeil dues au froid surviennent lors d’exposition à des températures très basses dont l’effet est accentué par le vent puissant : accidents en haute montagne, pratique des sports par basse température (ski, course à pieds…), parachutisme.
Les lésions siègent dans l’aire de la fente entre les deux paupières. Elles peuvent revêtir l’aspect d’une simple irritation superficielle, d’une ulcération, d’un œdème ou d’une véritable gélation de la cornée. Là encore, on arrête l’exposition au froid puis on rince et on appelle les secours.
Les brûlures par les radiations.
Les brûlures par les rayons ultraviolets (400-280 nm) sont les plus fréquentes.
Les sources d’émission sont variées : exposition solaire prolongée lorsque les rayons sont fortement réfléchis (neige, mer, désert), soudure à l’arc, lampes désinfectantes ou bronzantes. Les rayons ultraviolets sont presque totalement absorbés par la cornée où ils entraînent le détachement des cellules et un œdème.
Environ 12 heures après l’exposition surviennent des douleurs, un larmoiement et une photophobie avec un œil possiblement rouge.
La guérison survient en 48 heures et est facilitée par la fermeture des paupières.
Les brûlures par les rayons infrarouges (700- 3000 nm) (explosions, éclipses solaires…) se limitent pour la cornée à une kératite, mais peuvent provoquer une cataracte.
V. En résumé :
– Les brûlures oculaires sont des urgences absolues.
– Elles nécessitent une prise en charge immédiate, qui comporte la réalisation d’un lavage oculaire abondant et une consultation urgente avec un ophtalmologue.
– Essentiellement chimiques, elles peuvent aussi être thermiques ou radiques.
– ATTENTION aux capsules de lessive liquide ou en poudre chez les enfants !
On pourrait également rajouter quelques petites notions :
– Arrêter d’acheter des gadgets de survie qui ne vous serviront jamais à rien hormis vous rassurer pendant quelques minutes au moment de l’achat.
Procurez-vous plutôt des litres de sérum physiologique, c’est infiniment plus utile.
Et pour la date de péremption, ne vous inquiétez pas trop (on en parle dans nos formations : le programme ici) …
Vous pourrez toujours les utiliser avant cette fameuse date, ce n’est pas les situations qui manquent : le lavage des yeux et du nez après toute exposition à de la saleté/poussière, le lavage du nez quand vous souffrez d’un rhume, pour les parents avec des enfants en bas âge (lavage oculaire et nasale régulier), en cas de conjonctivite, en cas de picotement oculaire (fatigue sur port des lunettes notamment)… cependant : on se lave plus fréquemment les coudes que les yeux.
– Tout comme expliqué dans notre article sur la trousse de soins (ICI), le meilleur moyen de ne pas être malade est de ne pas tomber malade donc encore une fois anticiper les situations à risques avant qu’elles ne surviennent : PORTEZ DES LUNETTES DE PROTECTION dans toutes situations possiblement à risque : quand on va à la mer, quand on fait du ski, quand on utilise des feux d’artifices (la plupart des gens pensent à mettre des gants mais pas des lunettes, pourtant entre une main et les yeux, la priorité est vite faite), quand on bricole notamment en utilisant des produits chimiques …
– Dans le même registre, TOUS LES PRODUITS CHIMIQUES DOIVENT ETRE HORS DE PORTÉE DES ENFANTS.
Fermer les tiroirs qui comportent les assiettes c’est bien, mais ce n’est rien comparé à l’importance de ne pas laisser trainer les sachets en poudre du lave-vaisselle.
Ce qui est le plus dangereux, est ce à quoi l’on ne pense pas.
#Survivalisme#Brûlure#Yeux#Anticipation#LAVAGE
Dr Yves H. (médecin urgentiste)
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